Le député Vincent Trébuchet s’exprime sur la loi fin de vie au parlement - 13 mai 2025

14 mai 2025

Le député Vincent Trébuchet s’exprime sur la loi fin de vie au parlement

Transcrit par TurboScribe.ai - (de la vidéo sur youtube)

Quel vertige, quelles que soient nos convictions sur ces bancs, quel vertige à l’heure où nos débats vont aborder un principe fondateur de nos sociétés de plus de trois millénaires, tu ne tueras pas. Quel vertige de toucher peut-être, dans les prochains jours, au serment qui guide l’agir des médecins depuis 2500 ans, en ces termes, je ne provoquerai jamais la mort délibérément. Quel vertige, enfin, de légiférer peut-être à l’exact inverse de notre code pénal, qui pénalise en son article 223 toute incitation au suicide.

Si certains souhaitent toucher aujourd’hui à ces pierres angulaires de notre civilisation, de notre vivre ensemble, c’est certainement parce qu’aujourd’hui, comme de tout temps, le scandale de la mort et de la souffrance nous heurtent tous avec violence. La commission des affaires sociales a donc adopté une proposition de loi visant à légaliser le suicide assisté et l’euthanasie. Signe de la conscience aiguë de la dimension transgressive de ce texte, l’ensemble des réalités qu’il vise à légaliser ont été renommées.

Les termes suicide assisté et euthanasie n’apparaissent jamais, ils sont comme cachés derrière le terme aide à mourir. De même, la mort provoquée devient par le simple fait du législateur une mort naturelle. Madame la ministre, mal nommer les choses, c’est ajouter du malheur au monde.

On peut y voir une volonté de dissimulation ou bien la confession d’une impasse. Au fond, nous souhaiterions soulager sans tuer. Et pour certains, cette loi se veut un mal nécessaire, une transgression d’équilibre.

Au-delà de la question sémantique, c’est le deuxième débat clé. Une loi d’équilibre est-elle possible ? Chers collègues, l’expérience des pays qui ont légalisé la mort provoquée doit nous instruire. Toutes les législations ont débordé leur cadre initial.

Aux Pays-Bas, l’euthanasie représente 5,4% des décès et le débat s’ouvre sur l’euthanasie des biens portants de plus de 75 ans pour vie accomplie. Au Québec, où l’extension pour les troubles mentaux est prévue pour 2027, un rapport de l’ONU s’alarme déjà de la manière dont l’euthanasie est proposée aux plus fragiles, faute d’alternatives sociales ou médicales. Chers collègues, nos débats en commission n’ont-ils pas révélé eux-mêmes l’impossibilité d’une loi dite équilibrée ? Élargissement des critères d’éligibilité à une phase avancée non définie médicalement, l’égalisation de l’euthanasie qui devient la règle et non plus l’exception, refus de tous les encadrements proposés comme la protection des personnes déficientes intellectuelles.

Que nous disent ces faits ? Que, comme l’écrit Martin Hirsch, l’euthanasie ne s’encadre pas, elle déborde, par nature. Que lorsqu’on commence à transgresser, une nouvelle situation d’exception conduira sans cesse à un nouvel élargissement de la loi, jusqu’à l’inversion totale des principes, jusqu’à dessiner une autre vision de notre société. Après la question sémantique et la question de l’équilibre, c’est le troisième débat clé.

Quelle vision de la société sous-tend cette loi ? Certains assument de vouloir ouvrir une nouvelle liberté, la plus large possible, celle de choisir sa mort. Mais aucune loi ne donne une nouvelle liberté sans impacter nécessairement tout le corps social. Demain, si le suicide assisté ou l’euthanasie sont possibles, la question d’y recourir se posera à tous sans exception, surtout à ceux qui sentent qu’ils sont une charge.

Au Canada, les bénéficiaires d’euthanasie sont de plus en plus nombreux à présenter le critère de fragilité. En France, la proportion des seniors de plus de 75 ans va doubler entre 2024 et 2050. Comment être certain que des logiques financières n’accéléreront pas cette bascule, quand déjà certains acteurs mutualistes qui ont un intérêt financier évident à la légalisation du suicide assisté et de l’euthanasie s’en font les avocats dans tous les médias ? Le professeur Sicard écrivait, dans un rapport de 2012 commandé par François Hollande sur le sujet, « La pratique euthanasique intériorise des représentations sociétales négatives d’un certain nombre de situations de vieillesse, de maladie et de handicap.

 » Partout où ils ont été développés, ils constituent une réponse juste et humble qui soulage et qui assure à chaque Français de mourir entouré et dignement. Chers collègues, prenons l’engagement ferme, résolu, unanime, transpartisan de donner rapidement un accès complet aux soins palliatifs à tous les Français qui en ont besoin, en particulier aux habitants des 20 départements qui sont aujourd’hui scandaleusement dépourvus d’unités. Cette réponse seule sera à la hauteur de la devise qui nous rassemble ici, liberté, égalité et surtout fraternité.

Transcrit par TurboScribe.ai